Documentation professionnelle

11. « La conservation de la mémoire culturelle à travers les archives audio-visuelles » - Première session

Sessions présentées par la Commission des matériels audio-visuels et présidées par Elizabeth Giuliani, Bibliothèque nationale de France

Afrique, Belgique et Italie : projets audiovisuels innovants pour le collectage et la préservation de la musique est-africaine
Holling Smith-Borne et Steven Nordstrom, Vanderbilt University

Depuis 2006 une équipe de l’Université Vanderbilt à Memphis dans le Tennessee collabore avec une communauté située en Afrique de l’Est en enregistrant et filmant les pièces musicales et dansées de son répertoire. Un contrat lie ces artistes au groupe de recherche qui prévoit le versement d’un salaire et, en cas d’exploitation commerciale, le reversement d’une part des bénéfices réalisés. Dans un premier temps les prestations ainsi collectées sont mises à la disposition de la communauté et à celle des chercheurs sur le site de l’université. L’objectif est de former des équipes locales de collecteurs, d’élargir le champ de la collecte et de réévaluer les rémunérations des musiciens.

Compte-rendu par Elizabeth Giuliani

Le fonds Yves Becko de la Bibliothèque royale de Belgique
Frédéric Lemmers, Biblothèque royale de Belgique, Bruxelles

Le fonds Yves Becko a été acheté en 2004 par la Fondation Roi Baudouin et est en dépôt à la section de la Musique de la Bibliothèque royale de Belgique depuis le mois d’août 2005.
Né à Liège, l’ingénieur physicien, docteur en sciences appliquées et consultant en marketing Yves Becko (1943-2004) était un collectionneur passionné d’opéra et de disques anciens. Son fonds comporte près de 20000 disques 78 t portant sur le chant lyrique belge pour la période 1890-1950, plusieurs milliers de disques 33 tours, une soixantaine de cylindres, 18 rouleaux perforés pour piano mécanique, ainsi que des cassettes audio, des bandes magnétiques et vidéo sur bandes VHS.
Près de 2000 ouvrages imprimés et périodiques musicaux complètent le fonds et constituent une bibliothèque de référence pour la vie lyrique belge de la seconde moitié du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle, ainsi que pour l’histoire des techniques d’enregistrement sonore et du répertoire musical enregistré.
La communication portait sur les grands axes suivis par la Bibliothèque Royale pour la réalisation d’un vaste projet de valorisation de cette collection, comprenant la numérisation et la restauration d’un grand nombre de ses documents, la présentation d’une exposition atypique sur le thème de l’opéra belge à l’époque du disque 78 t, la publication d’un coffret de disques compacts et la mise en réseau des archives numérisées à des fins d’écoute en interne à la Bibliothèque royale.

Disque en vente sur le site de la Bibliothèque Royale de Belgique
Opera.be : la collection Yves Becko / [Livret d’accompagnement rédigé par] Frédéric Lemmers. – Bruxelles : Fondation Roi Baudouin, 2006. – 2 disques compacts = 1 brochure (96 p.). – Sous emboîtage. – ISBN 978-2-87212-499-2
http://www.kbr.be/

ODE Opera Discography Encyclopaedia
Carlo Marinelli, IRTEM = Istituto di Ricerca per il Teatro Musicale, Rome

Carlo Marinelli a présenté son projet en cours de publication sur internet de l’encyclopédie complète des enregistrements sonores d’opéra et de théâtre musical.
Ce projet, réalisé en collaboration avec le Laboratorio Nestor dell’ Università di Roma ‘Tor Vergata’ et avec l’IRTEM, recensera par ordre alphabétique des titres d’opéras, tous les enregistrements réalisés d’œuvres lyriques intégrales. L’encyclopédie en est actuellement à la lettre M.
Elle devrait contenir plus de 4000 opéras et environ 12000 enregistrements sonores, ce qui constituera une référence bibliographique unique pour toutes les bibliothèques possédant des archives sonores
http://www.irtem.it

« La conservation de la mémoire culturelle à travers les archives audio-visuelles » - Deuxième session

1. Sauvetage des documentaires de l’école italienne des années 1960 et 1970
Tiziana De Santis, IRTEM = Istituto di Ricerca per il Teatro Musicale, Rome

Depuis 1994 l’IRTEM a entrepris le sauvetage des documentaires réalisés dans les années 60 et 70 par des metteurs en scène et des compositeurs italiens engagés. Les musiciens qui collaborèrent à ces documentaires cherchaient de nouvelles solutions, de nouveaux langages à travers lesquels ils tentèrent de créer un rapport différent entre les images et la musique. L’on retrouve l’utilisation de langages musicaux tels qu’atonalisme, sérialisme, musique concrète et premières expériences de musique électronique. Tous ces langages ont été utilisés dans la musique de cinéma de cette époque. Pour le repérage des copies de ces documentaires, à part les archives de la « Cineteca Nazionale » dans lesquelles on s’est servi, on a utilisé les archives privées des metteurs en scène et des cinéastes. La plupart des copies étant dans un état critique, le premier travail a été de les visionner afin d’en vérifier l’état, puis de commencer les opérations de restauration puis, phase finale, de transformer les pellicules Betacam en DVD.

2. Sauvetage des archives sonores italiennes du 20e siècle
Cecile Montanaro, IRTEM = Istituto di Ricerca per il Teatro Musicale, Rome

L’IRTEM avec son département des archives sonores de la musique contemporaine, travaille depuis des années au sauvetage des archives de la musique contemporaine. Les enregistrements des saisons de concert de l’ensemble  Nuova Consonanza et les archives sonores du Gruppo di ricerca e sperimentazione musicale di Roma, constituent un témoignage précieux du climat culturel qui régnait à Rome durant les années 60 et 70. De plus la donation d’enregistrements des musiques de Domenico Guaccero (1927-1984), jusqu’alors conservées dans la famille, a permis d’entreprendre le catalogage complet. Le transfert numérique des données fait partie du projet de sauvetage. Il est fait selon les standards internationaux de IASA, International association of sound and audiovisual archives, et permettra l’accès des œuvres au public.

http://www.irtem.it/
http://www.irtem.it/ITA/archivi/asmc/archivio_sonoro.htm

3. Les urnes de l’Opéra ou le réveil de la Belle au bois dormant
Elizabeth Giuliani, Bibliothèque nationale de France, Paris

Le 24 décembre 1907 eut lieu dans les souterrains de l’Opéra de Paris une cérémonie où furent inhumés pour une période de cent ans, 24 disques donnés par Alfred Clark, le président de la Ccmpagnie française du Gramophone.
Voici un extrait du procès verbal relatant l’ensevelissement de ces voix dans les souterrains de l’Opéra de Paris :
« Le 24 décembre 1907 en présence de Monsieur Armand Fallières, président de la République, de Monsieur Aristide Briand, ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, (…) il a été procédé à la fermeture hermétique de deux boîtes contenant des disques Gramophone, offertes par Monsieur Alfred Clark aux archives de l’Opéra et destinées à être conservées dans un caveau spécial entre deux piliers du monument.
La volonté du donateur est que ces boîtes soient ouvertes seulement au bout de cent années afin d’apprendre aux hommes de cette époque :
1° Quel était alors l’état des machines parlantes encore aujourd’hui presque à leur débuts et quels progrès auront amélioré cette précieuse invention au cours d’un siècle ?
2° Quelle était la voix des principaux chanteurs de notre temps et quelle interprétation ils donnaient à quelques uns des morceaux les plus célèbres du répertoire lyrique et dramatique ? »

Le donateur Alfred Clark (1873-1950), après avoir travaillé avec Thomas Edison (1847-1931) puis Emile Berliner (1851-1929), s’installe en France en 1899, comme agent à la fois d’Edison et de Berliner où il fonde la Compagnie française du Gramophone, par la suite il sera directeur en 1909 de la Gramophone Company et terminera sa carrière en tant que président d’EMI de 1931 à 1946.
Cette donation était , certes d’abord une opération de promotion de la technologie de la Compagnie Gramophone mais elle fut aussi une expérience scientifique et la promotion musicale d’artistes comme par exemple  le ténor Francesco Tamagno dans l’air ‘Niun mi tema’ de l’Otello de Verdi ou la soprano française Emma Calvé dans un air de Carmen.
Après que la direction de l’Opéra se fut rendue compte que deux autres urnes enfouies en 1912 avaient été fracturées, les urnes seront confiées en 1989 à la Bibliothèque nationale de France qui sera chargée de leur sauvegarde.
Le 19 décembre 2007 une cérémonie, en présence de Bruno Racine, président de la BnF et de Gérard Mortier, président de l’Opéra de Paris, marqua ce centenaire symbolique : les urnes ayant été à l’époque par mesure de protection entourées de bandelettes d’amiante, leur ouverture a été retardée de quelques mois pour des raisons de sécurité.
En décembre 2008 sera organisé un colloque autour de la découverte du contenu de ces urnes, les disques devraient faire l’objet d’un enregistrement sur disques compacts par EMI Classic, et une cérémonie analogue à celle de 1907 est prévue en utilisant les nouvelles technologies.

Au-delà de cette histoire, qui nous replonge dans les aventures du fantôme de l’opéra, la conclusion de l’exposé porta sur :

  • quelles sont les informations transmises par ces objets ?
  • l’évolution des techniques de l’enregistrement et de sa lecture
  • l’histoire de l’édition phonographique et la constitution du  patrimoine sonore
  • l’interprétation et le répertoire lyrique en 1907 et aujourd’hui

A lire en complément dans France today : the magazine of French travel and culture, avril 2008, l’article de Michael Walsh Phantoms of the opera

Compte rendu des sessions : Laurence Languin

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